Textes de Franck G

lundi 6 mars 2017, par Webmestre

Atelier d’écriture autour de lectures des romans d’Eric Pessan Consignes : Débuter par « Il y a le feu sur terre.. » + Présentation de personnages et le texte se poursuit....

« Le feu sur terre » vu du café-restaurant l’avenir

Il y a le feu sur terre, ce matin-là. En boucle, les télévisions diffusent les même images. Dans une trentaine de grandes villes à travers le monde, des terroristes ont fait exploser plusieurs bombes sales de poussière de matières fortement radioactives, contaminant pour des centaines d’années les quartiers centraux de grandes cités.
Comme on le répète, à l’instar de Tchernobyl ou de Fukushima, toutes les zones contaminées doivent être évacuées séance tenante ;générant bagarres scènes de paniques et gigantesques embouteillages.

Les bourses et les quartiers d’affaires contaminés se vident, une crise de panique a également pris toutes les institutions financières, à un moment ou couvait déjà la crise des dettes souveraines, on se questionne, aucun Etat ne pourra faire face aux catastrophes. D’autres responsables se montrent au contraire rassurant. Avant la fermetures des bourses, les experts annoncent également la fermeture des banques pour une durée indéterminée, le plafonnement des retraits. Les cassandres prédisent un effondrement de l’immobilier dans certaines zones urbaines et donc d’ institutions financières ou de faillites privées avec des répercussions sur les monnaies.

Au fur et à mesure que la matinée passe, les mauvaises nouvelles s’enchainent. Au Café-Restaurant, « l’Avenir » à Orléans, les clients, visages interdits fixent l’écran au dessus du comptoir. Difficile d’y croire, de mesurer à quel point ce séisme va bouleverser soudainement la vie des uns et des autres.

Des centaines de milliers de Parisiens et banlieusards doivent quitter la capitale et se déverser en province. Des milliers arriveront dès ce soir dans d’hypothétiques centre d’accueil avec leurs seuls vêtements. Ou va t-on les mettre ? Qu’est-ce qu’ils vont faire ? Ne risquent-il d’apporter des saletés radioactives ?

Marcel, le patron gouailleur du Café-Restaurant, et que l’on entend plus beaucoup depuis quelque temps, halluciné devant devant le téléviseur, doit-il contacter son frère, ses cousins parisiens pour leur proposer de venir pour un moment ou d’attendre qu’ils le contacte ? Le studio qu’il a acheté pour un placement à Levallois, a t-il encore une quelconque valeur ? Qu’en est il de son petit portefeuille d’action ? Davantage des 1,50 euros qu’il vient d’encaisser pour un café. Pensées trop vertigineuses, le sol se dérobe, le vide, continuer de faire comme d’habitude, çà rassure, et puis peut-être ils trouveront bien finalement une solution.

A la table quatre, deux clients régulières portables en main, mines atterrées parlent au téléphone. Ce soir ou dans les jours à venir, elles accueilleront de la famille chez elles pour une durée indéterminée. Le siège de l’entreprise de l’une d’elle a fermé, le leader de l’immobilier de bureau voit son siège fermer et disparaître le majeur partie de son patrimoine. Sa copine en face d’elle vient de recevoir un sms de son mari militaire qui est réquisitionné pour une durée interminée, il ne repassera pas à la maison.

A la table 6, Jean, chauffeur livreur dans une coopérative fromagère est décontenancé, il ne connaît personne Là-bas à Paris, et cela n’aura pas d’impact sur la production et l’activité locale.

A la treize, deux personnages troubles terminent une andouillette frites. Dans quoi y aura t-il du fric à se faire ? Les réfugiés auront besoin de vêtements, de matériel de toilette, de véhicule d’occasion.... Qu’est-ce que l’Etat va distribuer gratuitement ? Qu’est ce que les uns et les autres auront besoin d’acheter ? Comment mettre la main dessus avant tout le monde ? Puis les revendre dans quelques jours ?

Marcel, le patron gouailleur peste, explose de colère, « quel merdier ! C’est pas vrai d’être tordu à ce point ! »

Texte rédigé durant le week end du 19 février 2017 à partir des lectures de l’ouvrage de Valérie Goby, Kinderzimmer et du logo rally des mots : déclencher, draps de soie, symétrie, bonne bouille fourmillement, échouer bouche, combinaison secrète, humus, mobile blanc et lisse, boule d’algues mortes, peau grise, gencives fondues

Trois copines, Léa, Noémie, Valérie, toutes les trois délaissées par leurs petits copains, et en difficulté à leur travail ont décidé de passer leur samedi soir au Luna park pour s’amuser entre copines.

Devant la forte affluence, les longues files d’attentes aux principales attractions, elles s’arrêtèrent devant le « château fantôme ». Hésitantes, jouer à se faire peur,est-ce le meilleur choix pour s’amuser ? Ne vivent-elles pas certains jour au boulot, avec leurs copains, déjà un peu de château fantôme ? S’y confronter, serait-ce une manière de se libérer définitivement ? Sans enthousiasme, elle se décidèrent, elles n’allaient pas rester là sans rien faire.

Affronter ses peurs, ou plutôt ses peurs d’avoir peur, les personnages en carton pâte actionnés par des poulies, des vérins, des ficelles, on le sait, n’est-on pas plus fortes que çà ?

La caissière encaisse avec distraction les trois billets alors qu’elle semble concentrée à regarder une série télé sur un petit poste en noir et blanc.

Après avoir pénétré dans un vestibule aux pierres vaguement peintes, éclairé par une lumière verdâtre, une fausse dalle en fausse pierre sur laquelle Valérie marcha s’enfonça d’une trentaine de centimètres. Les deux copines retinrent celle qui manqua de tomber à terre en pouffant de petits cris. Le mécanisme de la marche déchancha l’ouverture d’une trappe au plafond qui fit tomber un squelette à un mètre à peine des trois copines, précédé d’un cri hystérique qui semblait se propager par écho. « Même pas peur !

Puis, elle arrivèrent devant trois portes. Valérie essaya la première. Léa pouffa « le placard à balais ? » Elle pénétrèrent dans une chambre de style Gothique meublé de tentures en velour noir, entrecoupés de portraits inquiétants, et de nombreux miroirs. Des toiles d’araignées immenses reliaient les pointes de miroirs à des candélabres posés sur les meubles. Sur le lit soudain,il se passe quelque chose, un drap en soie blanche posé sur le lit se mit à bondir, puis à tourner dans la pièce. Par intermittence, les fils deviennent visibles. Le macabé qu’il cachait se releva mécaniquement. « Ca y’ est, c’est fini pour ici ! » Fit l’une d’elle. Un bruit se déchancha , une porte s’ouvrit, il fallait sortir par là vers un faux corridor sombre et poussiéreux. « ils ne font pas le ménage souvent » fit Noémie.

Elles avancèrent. Forcément un placard s’ouvrit faisant apparaître un gnôme verdatre en silicone avec un gros nez et une bonne bouille. « Bonjour toi ! », fit Léa

Une nouvelle porte s’ouvrit. La faible lumière baissait d’intensité pour rejoindre une quasi-obscurité, elles sentirent des fourmillements. Elles étaient caressées par un filet de soie noir et de petits fils métalliques peu visibles qui devaient envoyer une légère décharge électrique. Juste de quoi sursauter dans le noir. Alors qu’elles continuaient d’avançer, l’espace se rétrécissait, le sol s’effondra lentement sous leur pieds, les trois copines glissèrènt lentement dans un tobogan, lentement, puis plus rapidement dans le noir puis dans un espace surréaliste avant d’entrer dans la bouche d’un ogre, puis de basculer dans une sorte de pièce exigu au revêtement mou qui devait représenter une sorte d’estomac. Elles étaient coincées là, dans une sorte de cachot, dans la pénombre, sans portes de sorties apparentes. Cela dura un certain temps. Léa commençait à se sentir oppressée, une angoisse sourde l’envahit.
A tâtons, Valérie découvrit un espèce de dispositif ressemblant à une machine à sous, pour sortir. Il leur fallait trouver une combinaison secrète. Léa énervée voulait sortir tout de suite et commençait à paniquer, le stress de Léa commençait à angoisser Noémie qui voulait sortir également au plus vite. Peu à peu le stress contaminait les unes et les autres.

Valérie positionna deux squelettes et un fantôme sur les îcones et appuya sur le levier avant que les deux copines se mettent à crier. Une icône « perdu » s’afficha, et le bruit d’un mécanisme s’activa, il produisait des vibrations dans tous l’espace, soudain le sol se déroba, et de nouveau bascula. Les trois copines furent mises à terre et peu à peu tombèrent dans un tuyau les une derrières les autres, les jambes en avant ; elles passèrent dans un dispositif et se retrouvèrent emballées individuellement dans un sac en plastique fin jusqu’à la taille, puis glissèrent dans un long boyau en colimasson comme dans les aquaboulevards, en plus petit, et ce dans une athmosphère rougeatre qui devait évoquer des intestins. Cela dura un certain temps, il leur sembla. Au final, elles atterrirent emballées dans un sac poubelle noir déchiré de mauvaise qualité sur une couche d’humus noire, à coté figuraient des sortes de tas... s’avérant des gros cacas en carton pâtes avec des morceaux de crânes et de squelettes. « nous voici fécalisés ! » fit valérie, « dévorées, transformées en grosses merdes ! » fit Noémie.

Des squelettes blancs et lisses s’agitaient et semblait se foutre de leur gueule. Elle marchaient sur un sol mou , des boules d’algues mortes tombaient du plafond et remontaient immédiatement.

Une dernière trappe s’ouvrit, un macabé à la peu grise et aux gencives fendues surgit et se mit à faire un salut révérencieux, une porte s’ouvrit devant, une autre se ferma derrière elles.

Elles étaient dehors dans la banale agitation d’une fête foraine, juste devant un stand de vendeur de glace et de gaufres.

Les trois copines exprimaient des mines interdites, Valérie s’exclama théâtralement pour passer à autre chose « Des gaufres ! » Elle commanda une gaufre Nutela, boule de vanille, chantilly. Ses copines furent plus lentes à se décider. Elles avaient du mal à parler de ce qu’elles avaient vécu. Cela se terminait encore dans de la consommation, dans du sucré... Noémie et Léa avaient paniqué lorsqu’elles se sentirent coincées dans l’estomac. Cela évoqua à l’une, l’enfermement dans un placard un jour qu’elle avait fait une grosse sotise. Léa après coup, cela lui pris du temps, pensa à sa grand-mère internée pendant la guerre à Ravensbrück, elle avait séjourné quelques temps dans une cellule sombre. Sa grand mère avait eu du mal à en parler, mais des quelques traces de mémoires et de la gravité qui y avait été associé, elle avait transmis quelque chose de terrible. Elle n’y avait jamais pensé depuis, là c’était revenu. Ce n’était pas l’apparition des faux fantômes qui faisait peur, mais le sentiment d’être enfermé, coincé dans un dispositif dans lequel, il n’ y a pas d’espace de liberté ou de porte de sortie possible.

Etrangement, dans leur ancien boulot, même avec leur ancien copain, c’est parfois, une impression qu’elles ont ressenti, tout comme la nécessité de claquer du fric, être attirée par le sucré, avait offert un sentiment de compensation.

Franck Gauthey